Semaine du 23 au 29 décembre 2024 : UN NOËL AU MUSÉE

Chaque semaine, retrouvez les coups de cœur du 5e Lieu !

Le mot Noël est issu du latin “natalis” qui signifie “de naissance” et plus exactement (et par élision) de “natalis dies” qui signifie “jour de naissance”. Ce mot partage une racine commune avec ses équivalents dans plusieurs langues romanes : natale en italien, natal en portugais, navidad en espagnol… C’est la formule qui a été choisie en latin ecclésiastique pour désigner la nativité du Christ.

Dans le calme des musées, une semaine contemplative à l’essence de la fête, de la beauté et du sens du sacré.

TRIPTYQUE DE LA NATIVITÉ – MAÎTRE DES DEMI-FIGURES

Musée des Beaux-Arts

Le Maître des Demi-Figures est un artiste anonyme actif durant la première moitié du XVIe siècle à Anvers. Son nom, donné par les historiens de l’art, vient de la manière caractéristique dont il représentait ses personnages souvent à mi-corps. Figures de l’histoire sainte ou antique, reconnaissables à leurs jolis visages idéalisés de forme ovale tournés de trois quarts, les yeux mi-clos, ces derniers sont souvent inscrits dans un cadre paysager dans le style de Patinir réalisé avec une grande maîtrise de la perspective atmosphérique et un usage délicat de la lumière. Le style de l’artiste, caractérisé par un réalisme minutieux, une finesse dans le rendu des textures et le souci du détail compose une œuvre paisible empreinte de grâce idéale.

La scène de la Nativité occupe le centre du triptyque de Strasbourg. La Vierge agenouillée y adore l’enfant couché sur un bloc de pierre. En face d’elle, Joseph se prosterne tenant en main une chandelle tandis que deux petits anges agenouillés regardent le nouveau-né. Les figures s’inscrivent sur un fond paysager champêtre d’où arrivent par les côtés les bergers, avec au centre un décor d’architecture classique en ruine abritant bœuf et âne. Au volet gauche : la Présentation au Temple. Au volet droit : l’Adoration des Mages.

NATIVITÉ DU CHRIST, RETABLE DE LA CHARTREUSE

Musée de l’Œuvre Notre-Dame

Ce relief sculpté faisait autrefois partie d’un retable situé dans l’église de l’ancienne Chartreuse de Strasbourg, démolie en 1591. Deux autres reliefs sculptés issus du même cycle consacré à la vie du Christ sont conservés au musée : une Adoration des Mages et une Circoncision.

Ces panneaux de grande qualité manifestent une influence de l’art flamand, très sensible en Alsace dans la seconde moitié du XVe siècle, à la fois dans l’organisation des panneaux (groupés par deux de part et d’autre d’une figure centrale) et les sources iconographiques des différentes scènes. L’attention portée aux gestes, costumes finement détaillés avec les plis cassés caractéristiques et les particularités des visages, lesquels sont encore éloignés de l’expression intériorisée et individualisée qui caractérisera la sculpture à la fin du siècle.

La vierge est ici entourée de petits groupes de personnages, anges, bergers et sages-femmes, qui tous s’extasient devant le nouveau-né. Joseph est en retrait derrière Marie, comme le veut l’usage à la fin du Moyen-Âge.

CRÈCHE-RELIQUAIRE – BARBE HAAS

Musée Alsacien

Exceptionnelle par sa taille, sa composition et son excellent état de conservation, cette crèche reçue en donation en 2009, s’inscrit dans la tradition des « boîtes-paradis », confectionnées au XVIIIe siècle dans les couvents et qui présentaient l’enfant Jésus dans un environnement de fleurs et d’animaux. Dans sa boîte en verre surmontée d’un fronton, la crèche déploie son lot de figures, d’arbres et de fleurs aux détails foisonnants, avec une nativité lovée dans un coin de la partie basse. Sur fond rocheux en papier mâché, sous un village et une voûte céleste munie d’un petit ange, des personnages en argile de couleurs vives, santons d’origine provençale ou italienne, descendent la colline pour visiter l’enfant nouveau-né. Cette pièce a été confectionnée à Boersch et livrée à une famille de Rosheim en 1860, famille dans laquelle elle a passé quatre générations. Cet objet sophistiqué témoigne de la dévotion à la crèche, qui se pratiquait essentiellement dans les familles catholiques.

ADORATION DES BERGERS – CARLO CRIVELLI

Musée des Beaux-Arts

Crivelli est l’un des grands représentants, au même titre que Mantegna ou Botticelli, de ce style que les historiens ont appelé « style dur » et qui caractérise la peinture du Quattrocento entre 1450 et 1480.

Ce petit panneau en est une parfaite illustration. La présence insistante de la ligne dessinée cisèle ici chaque objet ou fragment d’objet, les distinguant comme pour les énumérer (les pierres du mur en ruine, les brins de chaque touffe d’herbe, etc.). Les formes s’y précisent à l’excès et il n’est pas jusqu’aux nuages qui n’en acquièrent une dureté minérale.

La scène est quadrillée par le jalonnement des arbres et des personnages et par un système de lignes perspectives très complexes (dans le raccourci de la hutte en particulier). L’œuvre est en ce sens très représentative de ce moment de la Renaissance où toutes les énergies semblent tendues dans la volonté d’analyser le réel, d’en structurer l’espace et de lui donner une interprétation précise et rationnelle.

VIERGE A LA TREILLE – HANS BALDUNG GRIEN

Musée de l’Œuvre Notre-Dame

Hans Baldung Grien est l’un des artistes les plus représentatifs et les plus originaux des débuts de la Renaissance dans la région du Rhin supérieur. Ce peintre et graveur de grande notoriété, né en Souabe mais élevé à Strasbourg, commence son apprentissage dans cette ville et le poursuit dans l’atelier d’Albrecht Dürer à Nuremberg entre 1503 et 1507. Il se réinstalle ensuite définitivement à Strasbourg, qu’il ne quitte que de 1512 à 1517 pour exécuter le retable du maître-autel de la cathédrale de Fribourg-en-Brisgau.

Hans Baldung Grien peint des sujets religieux pour des commanditaires privés, et en particulier des Vierges à l’Enfant qui étonnent par leur liberté de formulation et leur caractère équivoque. Cette jolie Vierge au double collier de perles retient d’une main sa robe de velours d’un rouge subtil sur laquelle s’étale sa chevelure d’un blond pâle. Elle soutient de l’autre l’Enfant endormi sur son bras droit dans une posture inédite. Un petit ange nu approche l’Enfant et tente de le réveiller pour lui offrir une grappe de raisins, symbole du sacrifice. Cinq autres angelots joueurs, très caractéristiques de l’art de Baldung, s’ébattent à l’arrière-plan dans une treille de vigne. Le groupe du premier plan, aux carnations cireuses, se détache sur le fond sombre, donnant à l’ensemble du tableau une préciosité presque irréelle.

Cette œuvre manifeste une tendance au maniérisme sensible dans la deuxième partie de la carrière de l’artiste, qui s’exercera en particulier dans le choix de couleurs acidulées, de compositions théâtralisées ou d’éclairages fortement contrastés.

Suivez l’actualité des Musées de la Ville de Strasbourg : https://www.musees.strasbourg.eu/